131 i ARCHITECTURE l
cependant 1e savant dialeeticien et metaphysieien. La dialectique et la
logique etaient passees d'Orient en Occident ; les methodes philosophiques
(165 docteurs (le Byzance avaient suivi le grand mouvement intellectuel
imprime par Charlemagne. Les theologiens occidentaux mettaient eu
oeuvre, des le x19 siecle, dans leurs eerits ou leurs discussions, toutes 195
ressources de la raison et de la logique pour arriver a la demonstration et
51 la preuve des verites mysterieuses de la religionk Personne n'ignore
l'immense popularite que s'etait acquise Abailard dans l'enseignement
pendant le xne siecle. Cet espriteleve et subtil, croyant, mais penchant
vers le rationalisme, faconnait 1a jeunesse des ecoles de Paris a cette
argumentation seolastique, a cette rigueur de raisonnement qui amenent
infailliblement les intelligences qui ne sont pas eclairees d'une foi vive au
(10L1LC- NOUS retrouvons cetesprit d'examen dans toutes les ceuvres d'art
du moyen fige, et dans l'architecture surtout, qui depend autant des
sciences positives que de l'inspiration. Saint Bernard sentit le danger : il
(TOHIDPit que cette arme du raisonnement mise entre les mains de la
jeunesse, dans des temps si voisins de la barbarie, devait porter un coup
funeste a la foi catholique; aussi n'hesite-t-il pas a comparer AbilllltPll a
Arius, a Pclage et aNestorius. Abailard, en 1122, se voyait force, au concile
de Soissons, de brüler de sa propre main, sans meme avoir etc entendu,
son Introduction ci la tlzefologie, dans laquelle il se proposait de (lefendre
la trmitc et l'unite de Dieu contre les arguments des philosophes, en
soumettant 1e dogme a toutes les ressources de la dialectique; et en M110,
a la suite des censures du concile de Sens, il dut se retirer a l'abbaye de
Gluny, ou les deux dernieres annees de sa vie furent consacrees a la
pcnitence. Cependant, maigre cette condamnation, l'art dela dialectique
devint de plus en plus familier aux ecrivains les plus orthodoxes, et de cette
ecole de theologiens scolastiques sortirent, au Xllle siecle, des hommes tels
que ltoger Bacon, Albert le Grand et saint Thomas d'Aquin. SaintBernard
et Abailard etaient les deux tetes des deux grands principes qui setaient.
trouves en presence pendant 1e cours du XIIÜ siecle au sein du cierge. Saint
Bernard representait la foi pure,le sens droit; il croyait fermement a la
theocratie comme au seul moyen de sortir de la barbarie, et il commencait,
en homme sincere, par introduire la reforme parmi ceux dontilvoulait faire
les maitres du monde: l'esprit de saint Paul residait en lui. Abailard repre-
sentait toutes les ressources de la seolastique, les subtilites de la logique et
l'esprit d'analyse pousse aux dernieres limites. Ce dernier exprimait bien
plus, il faut le dire, les tendances de son epoque que Saint Bernard; aussi
le haut cierge ne chercha pas a briser l'arme dangereuse CYAMÜHFG, mais a
n'en servir ; il prit les formes du savant docteur en conservant Foi-thodgxie
du saint. Nous insistons sur ce point parce qu'il indique clairement, a notre
1 Grägoire VII, Saint Frangois düissise et saint Thomas (PAQUÜT; Paf J- DÜIÜCIUIÜ-
Paris, 1846, t. II, p. 611 51 85. Ouvrages inädits (fAbaflard, par M. Cousin. Intro-
duction, p. CLV et suiv.