1,70
statue a Saint-Denis et dont M. A. Lenoir avait fait un saint Louis
pour les besoins de son musee; que celles de Louis XI et de ses con-
temporains; que celles de Louis XII, de Francois I", de Henri Il et
de ses successeurs; que celles des ducs de Bourgogne et de Bour-
bon, dont on possede de si beaux portraits peints ou des marbres
remarquables, pour ne "parler que de ces princes? Parmi ces por-
traits si divers, y en a-t-il un seul qui ne nous montre, comme dans
un livre ouvert, le caractere de ces personnages, leurs qualites ou
leurs defauts? Et sauf les portraits de Francois I", qui placent le
spectateur devant un homme vaniteux, leger et aux appetits bru-
taux, la plupart des autres ne montrent-ils pas dans la physionomie
une longue pratique des affaires, des hommes, et par-dessus tout une
habitude de reflechir qui semble disparaitre du type francais depuis
le xvne siecle, chez les grands aussi bien que chez les petits? A
quelle cause attribuer ce changement dans le caractere des physio-
nomies, si ce n'est a l'oubli du sentiment de la responsabilite per-
sonnelle, si puissant pendant le moyen age et si fort attenue par les
regimes despotiques et de centralisation administrative inaugurcs
depuis le regne de Louis XIV?
Nous croyons devoir terminer cet apergu relatif a la toilette par
quelques pages sur l'influence des femmes pendant la periode du
moyen age.
Les meubles, les ustensiles, les vetements adoptes par une societe
sont l'expression materielle des habitudes, des moeurs et usages de
cette societe. On n'a connu un peu Pantiquite que du jour ou les
villes de Pompei et d'Herculanum ont ete decouvertes, ou les tom-
beaux fouilles nous ont rendu les objets qui avaient appartenu aux
societes eteintes de FEgypte, de l'Asie, de PEtrurie et de la Grece.
Les inscriptions funeraires seules ont permis dapprecier exac-
tement les rapports des maitres avec les esclaves et affranchis, de
ceux-ci entre eux. Encore, ces documents sont-ils rares, et de trop
nombreuses lacunes existent pour permettre aux chercheurs les plus
sagaces de vivre au milieu des societes antiques et d'en connaitre
exactement le mecanisme et le genie.
Il n'en est point ainsi du moyen age : nous y touchons, nous
vivons de la plupart des traditions qu'il nous a transmises; nous
possedons sur ses moeurs et ses habitudes, qui sont encore les no-
tres en bien des points, des documents abondants. Ses monuments
sont encore debout, et les ecrits laisses par ses poetes, ses roman-
ciers, ses chroniqueurs, innombrables. Si nous ne connaissons pas le
moyen age, c'est, en verite, que nous ne voulons pas le connaitre,