TOILETTE
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richesse comme broderies, et qui ne pouvaient convenir qu'a des
personnes jeunes et tries-bien faites.
Le manuscrit de la Bibliotheque nationale de Lancelot du Lac,
de 1390 environ 1, offre cette particularite curieuse, que la plupart
de ses vignettes ont ete repeintes vers le milieu du xve siecle, et que
le peintre charge de faire cette restauration a modifie les vetements
pour les mettre a la mode de son temps. Dans ce manuscrit, une
miniature represeute l'armement d'un chevalier; Le personnage qui
remplit les fonctions de parrain est vetu (fig. 20) de chausses pour-
pres brodees d'or et d'un corset bleu egalement couvert de bro-
deries. Il est coiffe d'un bonnet gris violace, avec agrements d'or.
On ne pouvait guere aller plus loin en fait de vetements justes. Aussi
cette mode ne dura-t-elle que peu de temps, et les vetements plus
amples, les polices et robes longues, mais etroites, reprirent le
dessus. Alors aussi les femmes commencaient a laisser voir leurs
cheveux, et la mode des liennins outrecuidauts etait pres de sa lin.
La campagne de Charles VIII mit fin a ces exagerations de la der-
niere periode du moyen fige, et coupa court aux influences d'entre-
Rhin, qui, par la cour de Bourgogne, menacaient de supprimer les
dernieres traces delegance dans le costume francais. Mais ce serait,
pensons-nous, une erreur de croire que les influences d'entre-
monts sur les vetements francais se soient fait sentir pour la premiere
fois a la lin du xve siecle. Il y eut vers 1450 une certaine tendance a
adopter quelques-unes des modes italiennes. Il ne faut pas oublier
qu'en 1396 la republique de Gcnes s'etait donnee a la France, et que
Charles d'0rleans, a la mort de Marie Visconti, son oncle, en 1447,
revendiqua le Milanais. A la suite d'une expedition assez legerement
entamee, le duc dut se contenter du comte d'Asli, dot de Valentine de
Milan, sa merc. Il n'en demeure pas moins evident que, des le com-
mcncement du xve siecle, les rapports avec l'Italie, si brillante alors.
etaient frequents, et que, bien avant les expedilions de Charles VIII
et de Louis XII, nous avions ete a meme de prendre a ce pays des
modes et des habitudes de toilette. On reconnait, en effet, par bouf-
fees, dirons-nous, ces influences au milieu des traditions gothiques
encore si puissantes en France jusque sous le regne de Louis XI, et,
dans les bzitiments dus aux princes d'0rleans, Louis et Charles,
aussi bien que dans le gout de ces seigneurs pour les arts, soit dans
leurs joyaux, leurs armes et leurs vetements, des reminisccnces
italiennes des xiv" et xvt siecles.
No 12Ü,
franqais.