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developpement de l'esprit de solidarite entre les membres gaulois,
disloques par les gouvernements successifs des Franks. L'inlluence
consideralale des croisades jeta quelque trouble dans ce travail de la
nation; mais Pbilippe-Auguste, ayant su profiter bien mieux qu'aucun
de ses predecesseurs des elemcnts d'unite qu'il avait sous la main,
laissa en mourant, a la place d'un corps morcele, un pays constitue
sous une veritable monarchie. Aussi, est-ce a dater de ce regne que
la France possede une litterature, des arts a elle, et aussi des mite-
ments qui lui appartiennent en propre et dont les modifications
ne subissent que bien faiblement les influences etrangeres.
A ces habits somptueux, charges de broderies, dbrfevrerie et de
joyaux; a ces robes serrees, genantes; a ces details du costume in-
spires des usages orientaux qui conviennent si peu a l'allure francaise,
on voit succeder rapidement, au Xllle siecle, un vetement simple,
commode, a peu de chose pres commun a toutes les classes, et qui
tire toute sa valeur de la facon de le porter. On peut dire qu'avec la
naissance du xiu" siecle, la Gaule francaise se" retrouve, recompose
une nation ayant ses arts, son industrie, sa litterature, son genie,
son caractere et ses modes, car tous ces attributs de la civilisation
vont de pair. Uarchaisme byzantin et la tradition monastique font
place a Felement civil qui se manifeste dans les vetements comme
dans les arts, (les le commencement de ce siecle, et se developpe
rapidement. On cherche la forme la mieux appropriee aux habitudes
journalieres, comme dans l'architecture qui est aussi un veto-
ment on cherche les procedes de structure les plus rationnels;
car alors on ne separait pas l'art de l'industrie, on n'en faisait pas un
objet de luxe pour quelques privilegies, pour une caste isolee du reste
de la nation, ayant ou pretendant avoir ses mysteres interdits aux pro-
fanes. Et par cela meme que ce vetement etait approprie au corps, aux
habitudes ou aux besoins, il etait une des expressions de l'art.
Puisque, sous notre climat, il est necessaire de couvrir le corps,
le vetement doit exactement satisfaire a ce besoin. Pour y satisfaire,
il faut qu'il donne un abri sür, sans gener les mouvements. S'il
remplit exactement ces deux conditions principales, il est un objet
d'art. Or, il est peu depoques qui aient satisfait d'une maniere plus
complete a ces conditions que le xiuesiecle, s'il estadmis, toutefois, que
l'on ne saurait se promener a peu pres nus dans les rues. Personne
ne se refuse a reconnaitre que le nu quand le sujet est bien bati
ne soit la plus complete expression du beau, pour nous autres
humains; mais, puisqu'il est utile, urgent, de couvrir ce nu, et que
nous sommes, nous, Europeens, dans la necessite de le couvrir,