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ROBE
lite, quel sentiment de la realite, certains de nos peintres ont pu
rendre les vetements des derniers siecles et se penetrer de la physio-
nomie de ceux qui les portaient; mais si l'on remonte plus haut, si
l'on entre dans la periode du moyen age qui cependant preterait
tanta la peinture, alors nous retombons sur un poncif aussi faux
qulil est ennuyeux. Ces peintures rappellent le theittre et sa friperie,
l'atelier du costumier et le magasin des accessoires.
Maigre l'imperfection des representations peintes ou seulptees sur
les monuments du moyen age, surtout des epoques primitives, on
peut, avec de l'attention, distinguer ce qui, a travers cette imperfec-
tion meme, indique une habitude, un port, chez les personnages ainsi
representes.
La maniere de draper les vetements longs, de les relever avec les
bras, la demarche, sont appreciables, d'autant mieux souvent, que les
exemples sont plus grossiers et naifs.
Ainsi, par exemple, on observe que les personnages qui portent de
tries-longues manches ont toujours un mouvement recourbe de la
main pour qu'elle reste libre, en arretant le bord du vetement au
poignet; que les femmes ont habituellement l'un des bras ou une des
mains occupes a relever la partie de la robe trainante on le bord du
manteau ; que les longues manches exigent le ploiement habituel du
bras; qu'il y a presque toujours un mouvement du haut du corps
en arriere, sur les reins, pour fäloigner des pieds les plis tombants
de la robe; que les longues tresses ou les cheveux tombant par der-
riere invitent a tenir la tete haute et le menton en avant; que le
poids du manteau agrafe sur les epaules force a relever legeremeut
celles-ci par un geste habituel, pour mieux resister a la fatigue
causee par ce poids. On observe, chez les hommes egalement vetus
de longues robes, la coutume, lorsqu'ils sont assis, de passer une
jambe presque horizontalement sur l'autre, atin d'eviter ainsi le frot-
tement desagreable et le poids de Petoffe tendue sur les genoux;
l'usage de placer la paume de la main gauche sur la cuisse, aiin de
Soulager Pepaule du poids du manteau tombant de ce cote, en le
reportant sur le coude et Parriere-bras.
(Jette coincidence forcee entre le vetement et les mouvements
habituels du corps est un sujet däätudes plein dünteret pour les
artistes qui voient autre chose dans la peinture que la copie de cos-
tumes poses sur le premier modele venu, ne sachant pas souvent
meme porter l'habit du jour.
On s'imagine volontiers que nos aieux allaient vaquer a leurs
affaires ou a leurs plaisirs avec un ou deux vetements sur le corps,