HARNAIS
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que l'on tenait a paraitre en bonne ordonnance. On jugeait mieux
encore de la qualite d'un voyageur a sa monture et a la maniere dont
elle etait habillee qu'a la tenue meme du quidam. Les femmes sur-
tout voulaient etre bien montees : belles selles brodees et dorees,
beaux harnais, avec clochettes et grelots; houppes de soie et bos-
settes, pendeloques et laes. Aussi, les eperonniers et bourreliers
avaient ils fort a faire, et les euiriers ne savaient-ils quinventer pour
satisfaire aux fantaisies luxueuses de tant de chevaucheurs.
Les xvne et XVllle siecles, qui ont eu la pretention de tout inventer,
comme si, avant cette epoque, le monde n'avait existe qu'a l'etat
(l'embryon, nous veulent faire croire qu'ils ont trouve Pequitation,
l'art de dresser, de monter et d'habiller les chevaux. C'est une fai-
blesse dont il serait ridicule d'etre dupes. Il n'y avait pas un gen-
tilhomme, pas une dame, pas un bourgeois meme, pendant le
moyen age, qui ne sut monter a cheval, et cela des l'enfance. Que
les harnais fussent un peu differents de ceux adoptes depuis le
xvn" siecle, nous Paccordons; que ces harnais fussent moins bien
appropries a. la monture, ce serait un point a examiner, et la derniere
mode n'est pas toujours la meilleure, par cela seulement qu'elle est
la derniere.
Dans un temps ou il n'etait pas possible de voyager autrement qu'a
cheval, ou les gentilshommes passaient les trois quarts de leur vie
a cheval, il est difücile de supposer qu'on n'eut pas su adapter a
cet utile animal les harnais les plus convenables. Mais telle est la
vanite feroce du xvne siecle, elle considere ces siecles de chevau-
chees comme non avenus et pretend avoir tout trouve, depuis la selle
jusqu'au mors. Les celebres ecuyers de ce temps veulent bien ad-
mettre tout au plus que le connetable de Montmorency a invente
des branches de mors, dont nous trouvons des exemples datant du
xiv" siecle, et qui, si l'on s'en tient aux representations peintesmemon-
teraient au XIIIÜ siecle. Il en est de meme des mors a la Pignatel, qui
seraient dus au genie de cet ecuyer napolitain de la fin du xvi" siecle,
et dont nous avons des echantillons datant des xiv" et xve siecles. Mais
les ecuyers du moyen age n'ecrivaient pas des volumes sur l'art de
Fequitation, le pedantisme n'etait pas encore en honneur; ils se
contentaient de bien monter a cheval, de s'occuper de leurs betes
et des harnais qui leur convenaient, et ne se souciaient guere de ce
qu'en penserait la posterite.
On voit,en examinantle jeu dechecs dit de Charlemagnet, que dejii
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