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la famine; lui seul avait le pouvoir d'arreter souvent la main de
l'homme violent; quand l'ennemi etait aux portes, la chasse, parais-
sant sur les murailles, donnait du courage aux defenseurs de la cite.
Ce n'est pas tout : si le corps-saint avait le pouvoir de proteger la vie
des citoyens, d'exciter leur patriotisme, de les guerir de leurs maux et
de detourner les calamites qui les allligeaient, il etait encore une source
de richesse materielle, non-seulement pour Peglise, mais pour la po-
pulation au milieu de laquelle il residait, en attirant de nombreux
pelerins, des etrangers, en devenant l'occasion de fetes qui etaient
presque toujours aussi bien commerciales que religieuses. ll nous
suffit, nous le croyons, de signaler cette iniluence pour l'aire com-
prendre que rien aujourd'hui, si ce n'est peut-cire le drapeau pour
Farmee, ne remplace le corps-saint au milieu de nos cites. Qui donc
oserait traiter de superstition le sentiment qui fait que le soldat se
jette au milieu de la mitraille pour reprendre un morceau d'etoffe
cloue a une hampe? Et comment nous tous, qui regardons cet acte
comme un simple devoir que l'on ne saurait discuter, dont l'accom-
plissement l'ait la force d'une armee, comme le symbole de la disci-
pline et du patriotisme le plus pur, comment n'aurions-nous plus, a
defztut de foi vive, un profond respect pour ces chasses qui, elles
aussi, ont ete si longtemps en France l'arche de la civilisation? Et
cependant nous avons vu et nous voyons encore des (f-glises se defaire
de ces meubles venerables, les vendre a des brocanteurs, s'ils ont
quelque valeur, ou les laisser pourrir dans quelque coin obscur
parmi les immondices, si la matiere en est grossicre. Des cglises, les
chasses precieuses epargnees par la revolution ont presque toutes
passe, en France, des mains du clerge dans les collections publiques
ou particulieres.
L'histoire des reliques de saint Germain d'Auxerre est celle de
presque tous les corps-saints depuis les premiers siecles du chris-
tianisme jusqtfau x19 ou xne siecle. L'abbe Lebeuf l'a recueillie avec
soin d'apres les renseignements les plus authentiquesh nous la
donnons ici sommairement, afin de bien etablir dans l'esprit de nos
lecteurs cette distinction qu'il faut faire entre le sepulcre et la chasse.
Vers le milieu du v" siecle, saint Germain meurt a Ravenne; il
demande en mourant que son corps soit transporte a Auxerre. En
effet, ses restes sont deposes dans cette ville deux mois apres sa
mort. Le cercueil etait de bois de cypres, selon I-Ieric; il fut des-
' Mänl. concernant Phist. civ. et eccläs.
Pabbä Lebeuf, ädit 1848, t. I, p. 72 et suiv-
düuaverre
et
ancien (liocäse, par
S077,