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RELIQUAIBE
corps, et il fallut faire des reliquaires pour contenir ces parcelles.
Les croisades contribuerent puissamment a repandre la passion
pour les reliques saintes. Tous ceux qui revenaient de Palestine rap-
portaient quelque fragment sacre ou quelques ossements de saints.
Constantinople et Vcnise en vendaient a toute la chreliente, et fabri-
quaient les coffres ou etuis de metal, bois ou ivoire qui les conte-
naient. C'est ainsi probablement que les premiers emaux byzantins,
imites plus tard a Limoges, vinrent en France ; que les arts de l'or-
fevrerie et de la sculpture sur ivoire penetrerent en Occident. Cette
origine orientale est evidente, elle subsiste longtemps dans ces meu-
bles ou objets sacres, et lorsque deja les arts de l'architecture et de
la grande sculpture ont pris un caractere franchement occidental.
Uorfevrerie, la sculpture sur ivoire, les emaux, la eiselure sur me-
taux, les nielles, sont encore empreints des arts industriels de
l'0rient au commencement du X1118 siecle, tandis qu'a cette epoque
l'architecture rejette completement les traditions d'entre-mer.
Ce qui caracterise les reliquaires fabriques en Occident particu-
lierement pendant les X110 ct XIIIQ siecies, c'est qu'ils affectent a
fexterieur la forme des objets qu'ils renferment : est-ce un crane,
1e reliquaire est un buste d'or, d'argent ou de cuivre, reproduisant
les traits du saint; est-ce une cote, le reliquaire se recourbe en sui-
vant les contours de cet os; est-ce un bras, le reliquaire est faconne
en forme de bras vetu, avec la main benissant. Tandis que les reli-
quaires venus d'Orient, pendant les XIIÜ et XIII" siecles, sont des
coffres, des boites plus ou moins riches, mais qui etaient evidem-
mant des objets fabriques d'avance et" dans lesquels on placait les
reliques envoyees. Jamais ces reliquaires ne retracent en sculpture,
eiselure ou emaux, des scenes ayant un rapport avec l'histoire du
personnage dont ils contiennent les restes, et quelquefois meme cc
sont des scenes profanes qui entourent la boite sacree.
Le plus ancien et le plus precieuX de tous les reliquaires veneres
pendant le moyen üge est le saint Graal.
Nous dentreprendrons pas, apres MM. Paulin Paris, Le Roux de
Lincy et Francisque Michel, de dire quelque chose de neuf sur la
legende du saint Graal. Le saint Graal est le vase qui servit a Jesus-
Christ pour celebrei" la cene et dans lequel Joseph d'Arimathie
Leenz eut un veissel moult gent,
Oü Criz feisoit son sacrement;
l)
(Le Roman du saint Graal, vers 395. man.
fonds Saint-Germain, n" 1987 )
de la Biblioth.