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LUTRIN
Devant la porte se dresse le diable pret a le saisir; prenant son
epee, il coupe en deux le malin esprit, qui retombe dans la biere.
Dehors, le due se souvient qu'il a oublie ses gants sur lelutrin; il
revient sur ses pas, rentre dans le choeur et reprend ses gants. Depuis
lors il commanda qu'aucun corps mort ne restait dans une eglise sans
quelqu'un pour le garder.
Le lutrin etait generalement surmonte d'un trigle, qui dominait
les deux tablettes inclinees destinees a porter les livres de chant, ou
qui recevait la tablette sur ses ailes, si le lutrin n'en [iossedait
qu'une. L'aigle prend son vol vers les regions les plus elevees; c'est
pourquoi il accompagne le lutrin, comme pour porter vers Dieu le
chant des clercs. Guillaume Durand dit qu'on donne a saint Jean la
Figure d'un aigle, parce que son Evangile est celui qui s'eleve le plus
haut, lorsqu'il dit : a Dans le principe etaitle Verbe. l) SaintJerome
exprime cette pensee de Felevation du chant d'eglise vers Dieu lors-
qu'il conseille aux jeunes gens de ne pas eeouter le chant. a On doit,
ajoute-t-il, chanter pour Dieu, non pas autant avec la voix qu'avec
le coeur.
Les anciens lutrins de choeur ont disparu de nos eglises; ceux que
nous y voyons encore aujourd'hui ne remontent pas au dela du xvt
ou xvit siecle, et encore sont-ils fort rares. Nous n'en connaissons
aucun de Pepoque romane qui ait quelque valeur. ll faut donc nous
contenter de donner les seuls exemples existants.
Gomme nous l'avons dit plus haut, le lutrin de choeur est simple
ou double, dest-a-dire qu'il se compose d'une seule tablette inclinee
ou de deux. On voit encore un des premiers dans Peglise de Saint-
Symphorien a Nuits, qui date du milieu du XVO siecle (fig. fl). L'aigle
et le pied sont de bois, le support du livre, de fer. Ce support est
muni d'une rallonge A avec {lambeaux qui permet de placer, pendant
les offices de nuit, le livre de chant plus bas, pres de l'oeil, et de
Feclairer au moyen de bougies. L'aigle tient un dragon entre ses
serres, et pivote, a la volonte des chantres, sur son pied, au moyen
d'un fort cylindre de fer entrant dans une douille pratiquee dans la
tige octogone du pied. Cet aigle est dore, ainsi que la houle qui le
porte; le dragon est peint en vert. _Quant au pied, il a conserve sa
couleur naturelle 1.
Les vignettes des manuscrits nous donnent d'assez nombreux
exemples de lutrins de choeur dont les dispositions meritent d'etre
' Ce lutrin est reproduit
Siäcle de M. Gailhabaud.
une grande
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dans
lürchilecture
au X111"